Un jour de novembre, ambitieux comme un alcoolique convoqué à une cure de sevrage, tu t’en vas jouer au badminton.
Jetant ton dévolu sur un petit tournoi en famille, d’allure simple et débonnaire, tu penses alors juste répondre gentiment à l’apathie de ton corps qui ne te convient plus.
« Les personnages et les situations de ce récit étant purement fictifs, toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite. »
Avertissement
Outre la paresse, tu as besoin d’exulter à nouveau, de revivre, de sentir courir en toi la salubre agitation du sang remué par les mouvements de tes muscles pour oublier les couinements de tes genoux, les grincements de tes épaules.

Mais il est là. Lui aussi. Il trône dans le gymnase. Parfois caché dans un coin, replié sur lui-même ou son smartphone, on le remarque à peine et pourtant quand par mégarde tes yeux se posent sur lui, tu sais que tôt ou tard, il te faudra l’affronter, triompher de son entrain.
Le jeune !

Et son seul plaisir dans l’existence, son unique but, consiste à te voir haleter et à rire intérieurement de tes errements.

Lui, hautain et orgueilleux drapé dans sa jeunesse, certain de sa victoire, toi à moitié évanoui, finissant les matchs en nage, au bord de l’apoplexie, déprimé comme un dauphin privé de ballon quand tu perds, ou parfois (mais de plus en plus rarement) rasséréné comme un pigeon par son quignon de pain quand tu réussis à gagner.
Entre deux rencontres, pour donner le change, tu danses sur des musiques d’une autre époque que même le jeune salue d’un « like » encourageant.
L’estomac dans les chaussettes, tu te gaves de pizzas caloriques que tu auras bien du mal à éliminer…

Dans le fond, tu ne songes qu’au soir venu, à l’heure de rejoindre ton lit, quand après cette belle et bonne journée, une bonne tisane à main, tu pourras aller te coucher. Et dormir.
Enfin.
